Nature déguisée : camouflage et mimétisme, de Vincent Albouy, Éditions Quae, Paris, 160 p.
Outre son intérêt didactique, cet ouvrage, surtout destiné à un grand public cultivé, plus qu’à un lectorat de scientifiques (les noms taxinomiques en latin des espèces citées - pourquoi ne pas citer l’araignée-crabe sous son nom taxinomique ? - ne sont qu’occasionnellement mentionnés, ainsi que leur position systématique), ce bel ouvrage apparaît dès le prime abord comme un remarquable recueil de photographies qui ne peuvent que réjouir toute personne éprise d’esthétique et notamment séduire tout amateur de la beauté que peuvent parfois revêtir les formes animales. Le festival iconographique, qui est ici proposé, constitue un régal pour les yeux.
Les organismes mimétiques utilisent des moyens de défense, de protection ou de dissimulation défensive et intimidatrice (le lézard à collerette) dans différents objectifs : passer inaperçus notamment auprès des proies potentielles et lors de la reproduction, protection (dont dissuasive) contre les prédateurs, au moyen de différentes stratégies : pour se confondre dans le décor, comme les modifications de forme ou de couleur, mimer un ennemi de leurs propres prédateurs, ressembler à une espèce vulnérante, de mauvais goût, indigeste ou toxique, ou encore secrétant un poison ; le mimétisme chimique, peu traité par ailleurs, est ici abordé ; de même que le mimétisme comportemental des Diptères Syrphidae dont le vol simule ceux des bourdons et des autres gros Hyménoptères. La répulsion ainsi obtenue ne se limite pas spécifiquement à un seul prédateur, mais la totalité des espèces ressemblant au mime bénéficie de la même protection. La polychromie, dont le caméléon est l’exemple classique, est plus sous la dépendance de facteurs internes ou externes qu’à un comportement protecteur ou défensif ; selon les espèces animales, le changement de couleur est quasiment instantané, demande quelques heures ou dure parfois plusieurs jours. Les rapaces nocturnes vivant dans les cavités des arbres ont un plumage se confondant avec la couleur du tronc en en dissimulant l’entrée de la cavité qui abrite leur nid ; d’autres oiseaux de nuit et des Amphibiens se confondent directement avec l’écorce du tronc sur lequel ils sont posés. Les exemples classiques du phasme et de la phyllie sont présentés, ainsi que celui de chenilles simulant des branches ; d’autre chenilles arborent sur leur dos des ornementations très visibles ressemblant à des yeux. Certains cas de mimétisme ont inspiré les créateurs de tenues militaires.
Des exemples sont choisis dans le règne végétal, dont celui des orchidées, dont l’ornementation des fleurs rappelle beaucoup des livrées d’insectes, ce qui favorise leur exploitation par des pollinisateurs et par suite leurs fécondations par leur intermédiaire. L’auteur, entomologiste, semble avoir une culture plus limitée en biologie marine, puisqu’il s’abstient de mentionner que le petit poisson dont illustre l’homochromie avec un « corail » est une espèce d’Octocoralliaires (donc pas un corail au sens strict du terme) bien connu de la faune méditerranéenne, le Corallium rubrum, ou que l’organisme le plus visible sur l’une de ses photographies est un Alcyonium.
En définitive, un ouvrage que l’on prend beaucoup de plaisir à parcourir, déjà en premier lieu d’un point de vue esthétique.
Jean-Loup d’Hondt